Nous avons emménagé il y a moins d'une semaine dans un petit village à proximité de Montélimar.
Nous avons trouvé autour de la maison que nous louons un jardin extrêmement desséché. Et, sans surprise, il est à l'image de la campagne autour: des champs de lavandes rabougris, du maïs ou des tournesols qui n'atteignent parfois même pas le quart de leur taille normale. Dans les forêts, de nombreux arbres se dessèchent, brunissent et meurent... triste spectacle que l'on retrouve jusque dans les jardins des particuliers où arbres, arbustes et plantes, pourtant habitués aux étés chauds et secs, tentent difficilement de survivre...
Malgré tout cela, il y a quelque chose qui me frappe particulièrement.
Je me serais attendu en venant habiter dans une région au climat méditerranéen que les pratiques de jardinage, notamment celles du potager, seraient mieux adaptées au climat.
Pourtant, bien au contraire, dans la majorité des jardins que je vois dans les environs, c'est le schéma de jardinage traditionnel sur terre nue qui prévaut. Non seulement un jardinage sur terre nue, mais arrosé par aspersion, le plus inefficace des arrosages qui soit!
Alors que je pensais que les mentalités évoluaient rapidement, je me rends compte que pour beaucoup encore les pratiques du jardinage sont inadaptées aux réalités du changement climatique qui se font chaque année plus évidentes. L'idée qu'un vrai potager est un potager où l'on retourne la terre, trace des rangs bien droits, enlève la moindre herbe sauvage, tout "beau", tout "propre", et que l'on arrosé avec un arroseurs... a la peau dure...
Alors c'est l'occasion de partager mon expérience sur ce point.
J'insiste bien sur le fait que ce que je vais vous proposer marche!
Je pratique ce type de jardinage depuis des années avec succès, je produis quasiment tous mes légumes. Ce type de jardinage limite drastiquement les besoins en arrosage et limite énormément les efforts à fournir dans son potager pour avoir des récoltes tout à fait satisfaisantes. Je transmets depuis plusieurs années tout cela (et bien plus) dans mes formations, mes ateliers et mes conseils à domicile.
Alors, Allons-y !
Règle n°1: toujours couvrir son sol!
Un sol nu est un sol qui ne peut pas garder son humidité à cette saison. Et l'eau dans le sol est non seulement un des éléments fondamentaux pour la croissance de la plante, donc des légumes, mais elle est absolument indispensable à la vie du sol à son équilibre. Alors laisser un sol nu à des températures élevées soumise à l'effet desséchant du vent (dans la vallée du Rhône, le mistral et les vents Nord-Sud sont très importants), cela revient à tenter de remplir une baignoire percée: cela demande beaucoup d'eau, beaucoup de temps, c'est inefficace, un véritable gaspillage... En effet, si votre sol se dessèche, il faudra impérativement apporter plus d'eau pour que la plante aie ce qu'il lui faut. Si vous arrivez, d'une manière ou d'une autre, à conserver l'eau dans le sol et éviter l'évaporation solaire et éolienne, vous vous épargnerez un effort absolument considérable.
La meilleure façon de couvrir son sol pour éviter cette évaporation est le paillage, et par paillage il n'est pas question seulement de la paille, mais de toute matière végétale qui puisse couvrir le sol (tontes, feuilles, paille, foin, petites tailles d'arbustes, aiguilles de pin,... etc). En été, idéalement, l'idée serait de couvrir son sol de 20 cm d'épaisseur de paillage (mais 10cm, c'est déjà bien). Cela crée un véritable micro-climat sous le paillage qui agit comme une couverture isolante empêchant aux rayons du soleil et au vent de dessécher la surface du sol.
Autres intérêts très importants du paillage:
- presque plus besoin de désherber (moins de travail physique, désherbants inutiles)
- le sol est enrichi, nourri par le paillage qui se décompose (moins besoin d'apports extérieurs pour nourrir son sol)
- plus besoin d'emmener ses déchets verts à la déchetterie (moins de consommation d'essence, moins de pollution)
- et, comme me disent régulièrement mes clients : "plus besoin de motoculteur, alors!" (avec un paillage quasi permanent tout au long de l'année, le travail du sol se fait tout seul grâce à la vie du sol, et comme vu plus haut, le désherbage est quasi inutile).
Règle n°2: Mieux Arroser: moins souvent mais en plus grande quantité!
Par mieux arroser, il faut d'abord entendre: arroser moins souvent mais plus. Très souvent, on considère que l'on doit arroser très souvent son jardin pour avoir de beaux légumes. C’est une erreur! En effet, plus on va arroser fréquemment ses plantes potagères, moins les racines des plantes vont aller chercher de l'humidité en profondeur dans le sol. Donc, cercle vicieux, elles vont développer des racines seulement en surface du sol, et donc souffrir d'autant plus quand le sol en surface se dessèchera. En arrosant régulièrement, trop régulièrement, on rend la plante dépendante de nos arrosages fréquents. Par contre, en espaçant les arrosages dès la plantation, en les arrosant abondamment mais rarement, on encourage l'autonomie de la plante à développer ses propres racines pour aller chercher l'humidité en profondeur dans la terre.
Règle n°3: Mieux arroser: arroser là où la plante en a besoin!
La plante absorbe l'essentiel de l'eau par ses racines. Elle peut aussi absorber de l'eau par ses feuilles, mais cela n'est pas suffisant pour couvrir ses besoins. Alors quand on arrose, il faut chercher à trouver la meilleure façon pour que les racines aient de l'eau sans qu'il y ait de perte en chemin.
Malheureusement, de ce point de vue, le pire arrosage est l'arrosage aérien (sprinklers, arroseurs oscillants... des solutions qui restent majoritaires dans les potagers). Et le pompon, c'est quand on utilise des arroseurs aériens sous le soleil: dans ce cas-là, on peut perdre par évaporation plus de la moitié de l'eau destiné aux plantes. C'est le genre de gâchis que l'on ne peut pas (plus) se permettre. En effet, les rayons du soleil, la chaleur du sol et le vent sont autant de facteurs qui vont faire évaporer quasi immédiatement l'eau destinée aux racines de la plante. Il va donc falloir à tout prix chercher à rapprocher au mieux l'eau des racines en évitant le contact avec le vent et le soleil. Il existe de nombreux systèmes pour arroser son jardin de manière intelligente, économe notamment le goutte à goutte ou les tuyaux microporeux qu'on disposera idéalement dans le sol ou sous le paillage. Mais un goutte-à-goutte ou un tuyau microporeux à la surface d'un sol nu n'est pas l'idéal non plus: il y aura beaucoup moins de pertes sous un paillage.
Pour ceux et celles qui n'ont pas trop de surface, un arrosage à l'arrosoir permet de cibler encore mieux chaque légume en arrosant de manière "personnalisée" au pied du légume sous le paillage (sans pomme d'arrosage).
Sachez tout de même, que vous devrez prendre en compte le côté « isolant » du paillage quand il pleuvra, parce qu'une petite pluie n'arrivera pas à traverser le paillage pour humidifier le sol...
Règle n° 4: Mieux arroser: le soir ou tôt le matin!
Pour qu'une plante profite au mieux de l'arrosage, il faut l'effectuer à un moment où le soleil ne va pas en faire évaporer une partie et la plante ne va pas être sollicitée trop rapidement par le soleil qui déclenche ses mécanismes de transpiration.
Idéalement, c'est un arrosage le soir quand la température a commencé à baisser. Cela laisse le temps à la plante de refaire ses réserves d'eau et de repartir après la nuit pour une journée sous le soleil avec une réserve suffisante d'eau pour passer la journée ou plusieurs jours. Le deuxième meilleur moment de la journée, c'est très tôt le matin, idéalement avant le lever du soleil, pour les mêmes raisons. L'avantage supplémentaire, c'est que la terre s'etant refroidie pendant la nuit, il y a moins d'évaporation au contact de la terre qui a été chauffée pendant la journée.
En appliquant ces quatre principes, vous allez vous épargner énormément d'efforts, faire de considérables économies d'eau, et peut-être sauver votre potager de la sécheresse et de la canicule.
Alors, bon jardinage à tous!
Merci Christophe!
carrément très efficace: le super-paillage, en effet arrosage assez rare… sous le soleil berrichon. ça me va bien ;-) Les tomates sont en pleine forme: je constate que ton conseil d’enterrer les plans de tomates profondément (je n’en avais laisser qu’un tiers dépasser), a certainement bien favorisé aussi le développement des racines en profondeur… c’est top!!
Depuis le Berry, on a hâte de voir des photos de ton nouveau jardin dans la Drôme! Je recommande aux jardiniers qui ont un temps assez limité de suivre tes conseils simples & très efficaces. Et tes consultations à domicile : évidemment c’est « le must »! Merci encore. Marjolaine